Séance de questions et réponses avec la Dre Eva Grunfeld, gestionnaire du programme BETTER

Le programme BETTER fait partie de l’Initiative Connaissances et actions liées pour une meilleure prévention (COALITION), lancée par le Partenariat canadien contre le cancer en 2009, qui a permis de rassembler des experts en recherche, en pratique et en politique pour former des coalitions qui intègrent des stratégies de prévention d’autres maladies chroniques à la prévention du cancer. Le Partenariat a versé plus de 6,7 millions de dollars en faveur du programme BETTER depuis 2009, dont un financement de 2,98 millions de dollars échelonné sur trois années et ciblant sept provinces, à des fins d’« intensification et de diffusion ». L’accent a été mis sur les domaines cliniques offrant des soins primaires aux populations des régions rurales, éloignées et aux populations autochtones. Nous avons contacté la Dre Eva Grunfeld, cofondatrice et gestionnaire du programme BETTER, pour en savoir plus sur la phase suivante du programme.

Qu’est-ce que le programme BETTER?

L’Organisation mondiale de la Santé a déclaré que la montée des maladies chroniques est le problème de santé le plus urgent dans le monde aujourd’hui. La prévention et le dépistage constituent le meilleur espoir pour endiguer cette hausse. La recherche révèle que les fournisseurs de soins primaires au Canada n’ont pas la possibilité d’offrir des services optimaux de prévention à cause des exigences de la pratique actuelle et des contraintes imposées par le système de santé. Dans ce contexte, les conversations autour de la prévention sont souvent épisodiques et opportunistes. Nous avons mis au point le programme BETTER en 2009 afin de faciliter le dialogue et les recommandations en matière de prévention et de dépistage des maladies chroniques dans le cadre des soins primaires. L’idée était de former des professionnels de la santé, notamment des infirmières, des infirmières praticiennes et des diététistes au rôle de « spécialistes de la prévention », chargés de rencontrer les patients à l’occasion d’une visite dédiée à la prévention. Les patients consulteraient un professionnel de la santé pour avoir avec lui une discussion axée sur les facteurs de risque de cancer et d’autres maladies chroniques, y compris les facteurs de risque relatifs au mode de vie des patients, ainsi que leurs antécédents médicaux personnels et familiaux. Cette visite serait complétée par des processus fondés sur des données probantes, notamment des entrevues de motivation et la définition d’objectifs. Une « ordonnance de prévention » personnalisée serait ensuite fournie aux patients. Pour obtenir une explication en images du fonctionnement du programme BETTER, visionnez cette vidéo infographique que nous avons réalisée (en anglais seulement).

Quelle est la nouvelle phase du programme BETTER?

Au cours de la première phase du programme BETTER, en 2009, en collaboration avec ma collègue, la Dre Donna Manca, nous avons examiné l’incidence des interventions de spécialistes de la prévention dans des cliniques de soins primaires à Edmonton et à Toronto. L’étude a montré que l’intervention de ces spécialistes avait augmenté le nombre de mesures de prévention prises par chaque patient. La deuxième phase du programme BETTER s’est déroulée dans les Territoires du Nord-Ouest, ainsi qu’à Terre-Neuve-et-Labrador, et visait à comprendre les facteurs devant être pris en compte lors de la mise en œuvre du programme dans la pratique réelle. Cette nouvelle phase du programme BETTER facilitera la généralisation de l’adoption de stratégies de prévention des maladies chroniques et du cancer fondées sur des données probantes par la formation de professionnels de la santé au rôle de spécialistes de la prévention. Au cours des trois prochaines années, l’unité de l’Est de l’« Institut de formation BETTER » ouvrira ses portes pour desservir, au départ, l’Ontario, Terre-Neuve-et-Labrador, le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse. L’unité de l’Ouest de l’Institut desservira au départ l’Alberta, la Colombie-Britannique et le Manitoba. L’Institut se chargera de la formation de professionnels de la santé provenant de différentes disciplines au rôle de spécialistes de la prévention. Il offrira également des services consultatifs à des cabinets de soins primaires, à des groupes de médecins et à des organisations de soins primaires s’intéressant à l’approche BETTER.

Qui participera à la nouvelle phase du programme BETTER?

L’Université de l’Alberta, à Edmonton, accueillera la nouvelle phase du programme BETTER. Elle héberge également l’unité de l’Ouest de l’Institut de formation BETTER. L’unité de l’Est sera basée au Women’s College Hospital à Toronto (ressource disponible en anglais seulement), où la Dre Aisha Lofters est conseillère médicale. La Dre Manca sera la directrice médicale de l’Institut. Sa collègue Carolina Fernandes occupera les fonctions de directrice administrative. J’en serai la conseillère scientifique en chef. De nombreuses personnes et organisations, de même que de nombreux établissements de soins de santé ont participé au programme depuis sa création il y a 10 ans. Une liste complète des intervenants qui ont rendu ce programme possible et qui continueront d’y participer au cours des trois prochaines années est disponible sur le site Web BETTER (en anglais seulement).

Comment ce nouveau financement permettra-t-il au programme d’évoluer au cours des prochaines années?

Le financement de cette nouvelle phase nous permettra de passer de la phase de recherche et d’évaluation à la mise en œuvre à grande échelle. Le nouveau financement de 2,98 millions de dollars du Partenariat nous permettra d’ouvrir deux sites de l’Institut de formation. Cela renforcera notre capacité à former des professionnels de la santé au rôle de spécialistes de la prévention, dans tout le Canada, et à mettre ces nouvelles compétences au service de leurs cliniques. Le financement nous aidera également à atteindre l’objectif à long terme de permettre à l’Institut de formation BETTER de devenir autonome grâce à un modèle de recouvrement des coûts. Au cours des 10 prochaines années, nous prévoyons que l’Institut attirera d’autres types de fournisseurs de soins de santé. Si les soins primaires constituent notre priorité, nous nous sommes toutefois bien conscients que l’approche BETTER est tout à fait adaptable à d’autres contextes et pratiques de soins de santé. Nous souhaitons mettre à profit les années à venir pour développer le programme et déterminer la meilleure approche pour l’étendre à d’autres fournisseurs de soins de santé. Nous étudions actuellement l’efficacité de l’approche BETTER dans le domaine de la santé publique et pour les survivants du cancer.

Du point de vue du patient, que signifie la nouvelle phase du programme BETTER?

L’objectif du programme BETTER est de s’éloigner d’un système de santé fonctionnant sur un modèle de prise en charge des maladies en donnant aux Canadiens la possibilité de se concentrer sur la prévention des maladies, leur bien-être et l’amélioration de leur santé en général. Notre objectif est de faire en sorte que chacun d’entre eux, indépendamment de son lieu de résidence et des soins primaires qu’il reçoit, ait la possibilité de s’entretenir avec un spécialiste de la prévention dûment formé, dans le cadre d’une visite dédiée. Nous souhaitons que chaque Canadien ait la possibilité d’obtenir une ordonnance de prévention personnalisée et réaliste, et nous souhaitons que les professionnels de la santé puissent aider les patients dans la définition et la réalisation de leurs objectifs en matière de santé. La prévention est l’avenir d’un système de santé durable au Canada et le programme BETTER a un rôle à jouer pour permettre aux Canadiens de prendre en charge leur santé et de réduire leurs risques d’avoir un cancer et d’autres maladies chroniques.

Quel a été votre rôle, à titre personnel, dans la gestion du programme BETTER?

J’ai rédigé la proposition initiale du programme BETTER en 2008. Voir évoluer le programme au cours de ces années s’est avéré une expérience incroyable. Que de chemin parcouru! Nous sommes parvenus à intégrer les données probantes dans la création du programme, à mettre en place la formation des spécialistes de la prévention, et aujourd’hui à créer l’Institut de formation BETTER. Ces réalisations, combinées aux collaborations qui ont contribué à l’élaboration du programme, ainsi qu’à l’énergie et aux efforts de mes collègues, en ont fait l’un des projets les plus gratifiants de ma carrière. Lorsque j’ai rédigé la proposition initiale, j’avais l’impression d’écrire une pièce de théâtre. Aujourd’hui, je me sens un peu comme un dramaturge qui assisterait à la première représentation de sa pièce, avec de véritables acteurs donnant vie aux idées qu’il a couchées sur le papier.

Pour en savoir plus sur le programme BETTER, visitez le site http://www.better-program.ca/accueil.

La Dre Eva Grunfeld est gestionnaire du programme BETTER ainsi que professeure et vice-présidente (recherche) du Département de médecine familiale et communautaire de l’Université de Toronto. Elle est également clinicienne-chercheuse et directrice du programme de recherche sur les services de santé et sur l’application des connaissances de l’Institut ontarien de recherche sur le cancer.